Parcours d’une militante infatigable des droits humains. Entre sa carrière d’enseignante, ses fonctions au ministère du Plan et du Développement, son passage comme Ministre des Droits de l’Homme et de la Consolidation de la Démocratie, et son engagement de longue date dans des associations de défense des droits des femmes, elle n’a jamais renoncé à se battre pour faire avancer la cause des femmes au Togo. Un modèle inspirant pour la nouvelle génération.
Pouvez-vous vous présenter à nos lectrices et nos lecteurs ?
Je réponds au nom de Madame Amagbegnon Akouavi Sélonou Célestine, épouse AÏDAM. Je suis mère de quatre garçons qui m’ont déjà donné treize petits enfants. Je suis née à Atakpamé (Préfecture de l’Ogou), d’où sont originaires mes parents.
Pouvez-vous nous raconter votre histoire ?
Dans ma famille biologique, nous sommes une fratrie de dix-huit enfants, garçons et filles, dont je suis l’aînée. Mon papa a eu trois épouses. Nous vivions tous sous le même toit dans une ambiance conviviale et à l’abri de tous besoins. J’ai eu la chance d’avoir des parents très soucieux du bien-être de leur progéniture.
Mon papa opérait dans le secteur du transport, du commerce et de la distribution des biens de consommation courante. Il voyageait très souvent. Toutes ses épouses étaient également très actives dans le petit commerce des produits alimentaires. Chaque semaine, du lundi au vendredi, elles se rendaient au marché pour écouler leurs marchandises. Pratiquement tous les week-ends, elles allaient dans les villages environnants pour s’approvisionner en noix de palmiste qu’elles transformaient en huile.
En l’absence de nos mamans, c’était à moi que revenait la charge de la garde de mes petits frères et soeurs. Ainsi, très tôt, à un bas âge, j’ai été mise face à mes responsabilités de grande soeur. L’aînée que j’étais devais prendre soin des plus petits ; ils étaient toujours deux ou trois. Cette situation m’a permis d’acquérir précocement et de développer un sens très aigu de la responsabilité, de la rigueur et une disposition naturelle à me préoccuper de l’autre.
Devenue adolescente, je passais mes vacances scolaires à m’initier au petit commerce pour me faire un peu de sous pour mes petites dépenses. Je revendais des fruits que j’allais acheter chez les grossistes. Cette activité a eu le mérite de susciter en moi et d’impacter positivement ma vision de la femme responsable et autonome financièrement.
Que pouvons-nous retenir de votre parcours scolaire et universitaire ?
Arrivée à l’âge de la scolarisation, à la différence de la plupart des parents qui inscrivaient leurs enfants dans les écoles publiques mixtes, mon papa a préféré me placer dans un établissement confessionnel de jeunes filles, dirigé par des Religieuses. C’est dans ce milieu que j’ai évolué, du primaire au secondaire, à Atakpamé d’abord jusqu’en classe de troisième, ensuite à Lomé où j’ai achevé mon parcours scolaire par l’obtention du diplôme du Baccalauréat, série scientifique.
Par après, je me suis inscrite à la faculté des sciences économiques et de gestion de l’Université du Bénin (actuelle Université de Lomé) d’où je suis sortie nantie du diplôme de maîtrise en gestion des entreprises.
À l’issue de votre parcours universitaire, comment s’est opérée votre immersion professionnelle sur le marché du travail ?
Ma vie d’étudiante a démarré en même temps qu’une vie de couple et toutes les responsabilités y afférentes. J’ai donné naissance à mon premier garçon dès ma première année. Les nouvelles contraintes liées au statut de maman n’ayant pas trop perturbé l’avancement normal de mes études, mon deuxième enfant est arrivé dans la foulée.
Peu de temps après, j’ai obtenu mon diplôme qui m’ouvrait la porte d’entrée dans la vie professionnelle. Mon profil me prédisposait à un poste au sein d’une entreprise et c’est sans difficulté que j’ai obtenu un contrat de stagiaire auprès d’un établissement bancaire de la place, à Lomé où nous vivions, mon mari et moi. Mais le sort en avait décidé autrement.
À peine avais-je commencé le troisième mois de mon stage que mon mari, fonctionnaire, fut muté à l’intérieur du pays, dans un milieu qui, en ce moment, n’offrait pas beaucoup d’opportunités d’emploi dans le secteur privé. C’est donc par la force des choses que je me suis fait engager comme professeur d’économie et placée au Lycée Moderne de Sokodé. La profession d’enseignant n’avait jamais effleuré mon esprit, maisj’y ai pris goût rapidement et y ai passé une quinzaine d’années avant de changer d’activité. Je n’ai eu aucun regret d’être passée par là. Cette expérience m’a plutôt bien enrichie aussi bien sur le plan humain que sur le plan intellectuel. Je reste reconnaissante à la Providence de m’avoir ouvert cette voie.